Bienvenue en Chartreuse, ce massif calcaire que nous aimons bien situé juste au dessus de Grenoble et encore
bien préservé et sauvage.
Il faut dire qu’il est bien gardé par la « police locale » qui veille au grain et au respect de ce superbe terrain de jeu d’escalade traditionelle. Les entreprises y sont souvent sérieuses et fastidieuses du fait de la qualité moyenne du rocher.
Voici un article qui présente le parcours d’un itinéraire d’escalade au Grand Manti: d’aspect déversé et délité, la paroi jaune fait à peu près 450m de dénivelé, nous nous lançons vers un objectif majeur: la Voie Centrale est peut être LA ligne du massif ?
Peu de répétitions en effet pour cet itinéraire qui est devenu malgré lui quelque peu légendaire: il a était considéré durant les années 70 / 80 comme l’un des itinéraires les plus sérieux et difficiles des Préalpes, et cela à juste titre.
La « paroi jaune » est pourtant située à quelques km de Grenoble et il paraît difficile de l’ignorer en passant sur la route de la Savoie ou de Chamonix. L’ouvreur, B.Vartanian signait là en juin 1968 un itinéraire d’envergure, exposé et engagé, avec son lot de logistique et d’incertitude concernant la structure et les passages clés de l’ascension dans sa partie supérieure.
La première répétition a été réussie par les Bruno BBX et Martel en 1985 après préparations, la deuxième répétition est signée en 1997 par la cordée de Jérôme Arpin et lors d’un stage CAF Elite de plusieurs cordées, là aussi après préparations également.
L’objectif pour nous était de signer la troisième répétition et la première par une cordée de deux grimpeurs, en 23h effectives dans notre style le plus pur: sans repérages ni préparations avec l’obligation de terminer la journée installés au « palais des choucas », notre premier bivouac.
La première journée a été éprouvante, la logistique et l’effort à deux en terme de portage et de hissage pour ce type de voie en cette saison est rude … départ de Marseille donc autour de 7H30, préparation des sacs suivie d’une longue marche d’approche bien pénible sur la fin pour une attaque à 14H, arrivée au bivouac à 22H sans traîner, les sacs pèsent un âne mort, le bas n’est pas très raide et les relais pas hypers conforts pour le hissage!
L’escalade en bas est technique, exposée et encombrée de végétation, on y grimpe concentré et la prudence est de mise aux premiers relais.
A noter un passage « surprise » assez extrême en terme d’exposition dans l’arbre mort qui défend l’accès au bivouac.
Le premier bivouac est une gorge humide, assez confortable et très fraîche encore en cette saison. La deuxième journée commence par la grande longueur d’artif sous le toit esthétique et soutenue. L’itinéraire évite les surplombs médians, « la poire » par un large crochet à droite puis revient en ascendance à gauche par une grande longueur de mixte pas évidente à protéger. Le rocher est parfois mixé avec de la glaise, franchement du jamais vu!
On arrivera à la vire triangulaire assez tôt ce qui permettra de s’avancer pour le lendemain par la première des deux longueurs clés de la voie, ici le pitonnage obligatoire en rocher très pourri commence, il faut prendre le temps de se protéger correctement et de construire des relais corrects, une bonne expérience dans ce type de rocher est nécessaire.
Très déçus par la pente du bivouac de la vire triangulaire, nous prenons le temps de faire du terrassement pour passer une belle nuit, le matin ça y est il fait enfin grand beau: la canicule pointe son nez dans cette falaise orientée plein Est, il fait 30° à 8h00.
Voilà la deuxième longueur clé, on pense forcément aux ouvreurs qui auraient pu se retrouver dans un méandre de toits pourris et de conques non fissurées; on devine une ligne de faiblesse dans ce qu’on peut appeler un filon friable de rocher pourri qui se fissure sur une trentaine de mètres, une fois arrivés au relais on sait que la voie est sortie! Encore un dernier petit surplomb et les 80 derniers mètres déroulent comme d’habitude dans du rocher béton.
Le retour par l’Aup du Seuil est toujours aussi long quand on est chargé mais il nous reste de l’eau, des vivres et du moral alors tout va bien … arrivée à Marseille pour 00H30, heureux !
Au final, c’est un itinéraire de grande classe sans échappée possible dont les difficultés variées se déroulent sur un rocher mauvais: du libre exposé, du mixte osé et obligatoire et de l’artif délicat.
On trouve très peu d’équipement en place sur l’ensemble du parcours: une dizaine de pitons et quelques spits aux relais dans la première moitié (visiblement mis du haut par des spéléos), quant à nous, nous avons laissé une plaquette sur une vieille douille à la vire triangulaire ainsi qu’une lame dans la longueur d’artif difficile.
Merci Bernard pour tes encouragements, un grand respect aux Voironnais qui se sont pris la pluie dans leur automnale, ça a du être coton dans ce rocher très boueux. Une pensée pour Bruno Martel.
voici une ébauche de topo pour les prochains: la Voie Centrale ainsi que quelques photos en diapo